"N’oublie jamais l’huile d’olive", me disait toujours mon amie de 95 ans, la Signora Maria Volontà, pendant qu’elle en versait un filet dans un ragoût de fèves. Maria Volontà vient de Bova en Calabre. Je l’ai rencontrée pour la première fois lors d’un voyage de recherche pour un livre. Depuis notre premier entretien, nous sommes restées en relation. Maria m’a même proposé de devenir ma nonna italienne à titre honorifique quand elle a appris le décès de ma grand-mère. Ses leçons sont celles qui apprécient les ingrédients simples et la valeur nutritionnelle des graisses végétales. Beaucoup d’Américains ont intériorisé le dogme de "mangeurs de viande" qui prône la consommation de protéines animales pour le maintien en bonne santé, mais le fait est que l’on peut s’en passer. Les adeptes d’un régime Keto vont peut-être s’arracher les cheveux quand je dis cela. Nous ferions mieux d’écouter la Signora Maria. Elle a grandi en mangeant ce qu’elle a planté, conservé et cuisiné elle-même. Quand elle avait plus de trente ans, bien après la Deuxième Guerre mondiale, on ne mangeait pas de viande dans les villages de l’Aspromonte, sauf pour les fêtes, on ne buvait pas de lait de vache et il n’y avait pas d’argent pour acheter des produits "importés" d’autres villages. L’économie était encore féodale, le travail était rétribué en nature et non en argent. Très souvent le salaire journalier était payé en huile d’olive. La famille de Maria consommait donc les produits de son jardin et la riche huile italienne. "Que mangiez-vous en hiver ?", lui ai-je demandé. "Des lentilles, des fruits secs, des pâtes sèches, des légumes verts de montagne, et des pois chiches. Des pois chiches, j’en ai plein mon garde-manger." Qu’en faisiez-vous? "Eh bien, tu peux les mélanger aux pâtes, mais ils sont aussi très bons comme ça, tout seuls." Comme quoi le plus simple peut être délicieux, une seule chose peut suffire.